Chadi Baraia, Espoir Français

« Chaque année en France, des milliers de femmes et hommes suent sang et eau dans l’ombre des salles de boxe. Certains veulent apprendre à  combattre, d’autres viennent se défouler ou se lancer des défis… une petite poignée seulement est destinée à briller jusqu’aux plus hauts sommets du Noble Art.  Une technique innée, une gestuelle ou le  punch qui fait la différence et saute aux yeux. Leur talent se démarque et se remarque au fils des compétitions amateurs, ils sont nos champions de demain, nous leur donnons ici la parole. »

CHADI BARAIA « The little Pharaon » : le talent et l’ambition !

Le jeune Chadi Baraia, Franco-Égyptien âgé de 18 ans, compte bien faire parler de lui dans les années à venir. Avec ses bras tentaculaires, il affiche déjà  un envieux palmarès de 30 victoires dont  9 avant la limite) pour 39 combats.  Le jeune homme voit loin: la ceinture WBC autour de la taille, les unifications et les combats dans les salles mythiques des États Unis d’Amérique, il en rêve, mieux, ce sera son objectif ultime lorsqu’il rejoindra le monde professionnel. 
Avant tout cela, Chadi a dores et déjà les yeux rivés sur 2024 et les Jeux Olympiques de Paris.  Le jeune champion veut briller devant sa famille et les caméras du monde entier. Déjà champion de France cadet, vice champion de France junior, médaillé d’or et d’argent lors de divers championnats internationaux et membre de l’équipe de France depuis 2017, le curriculum vitae de Chadi affiche déjà quelques belles lignes. L’année 2020 devait lui ouvrir les portes d’un championnat d’Europe menant aux Championnats du monde amateur et c’est avec humour et un peu de malice qu’il nous confiera que le  confinement et l’annulation des compétitions ne l’auront pas impacté car il était sur le point de déclarer forfait pour une rupture du ligament du pouce. Le malheur de l’un fut aussi le malheur des autres et les compteurs sont remis à zéro avant la reprise des compétitions internationales où le jeune homme entend bien se montrer.  Qu’on se le dise; il faudra désormais compter sur le nom de Chadi Baraia chez les 68kg !  


BN: Comment as-tu commencé la boxe et qu’est ce qui t’a attiré dans ce sport ?
J’ai commencé à 5 ans environ, mes deux grands frères, Nader et Ramy faisaient déjà de la boxe et ils m’emmenaient souvent à la salle. J’y ai pris gout rapidement. Le lieu où j’allais pour me défouler est vite devenu un lieu de passion où l’envie et la recherche de réussite ont pris le pas. À la base c’était déjà un sport de famille mais j’ai vraiment accroché et ça m’a aidé à me canaliser. En effet j’était hyperactif petit, et je le suis toujours un peu aujourd’hui , la salle m’a permis de me calmer et de transformer cette énergie en force. Mon père, qui est un grand passionné de boxe, a décidé de nous mettre très jeune à ce sport de façon à éviter la rue. Nous venons de la banlieue parisienne, j’ai passé mon enfance dans le quartier de La Croix Blanche à Vigneux-sur-Seine et il voulait qu’on évite les problèmes, donc nos journées consistaient à aller à l’école, ensuite au sport, puis après le sport on rentrait et on était fatigué, voila, pas le temps de traîner !

NB: Comment se passe ton camp d’entrainement avant une compétition.
La différence entre la boxe pro et la boxe amateur, c’est qu’en professionnel tu ne combats pas tout le temps, tu restes actif et seulement quand tu as un combat tu commence une préparation. Nous en amateur il y a des combats quasiment tout le temps, donc il faut toujours être prêt, car du jour au lendemain on peut m’appeler pour un combat et je dois être prêt. Rien ne change dans l’année, c’est toujours la même routine avec mon entraîneur Riad, on répète, on répète, on s’entraîne dur tous les jours, comme ça il n’y a pas d’excuses, si on m’appelle je suis prêt.

BN: Quelle  relation entretiens-tu avec ton entraîneur Riad Kherbach ?
Riad, c’est comme un frère, il m’entraîne depuis que j’ai 9 ou 10 ans, on connait nos familles respectives, c’est un homme très bon. En tant qu’entraîneur il est super, il a été  international Marocain en boxe Anglaise et boxe Thaïlandaise donc il connait le noble art. Et puis il y a une sorte de symbiose entre lui et moi, il m’apprend chaque jour de nouvelles choses, de nouvelles techniques qu’en équipe de France on ne m’a pas apprises et inversement je lui apprends certaines choses vues avec l’équipe de France qu’il ne connait pas, tout est bon  entre nous deux pour évoluer .


BN: Quel est ton but amateur? Et après ?
La finalité de ma carrière amateur serait de participer aux JO de Paris 2024. Donc j’ai 4 années pour y arriver, j’entamerai ma première année senior en 2021. L’idée c’est d’aller le plus loin possible dans les championnats dès le début. Je commencerai cette première année senior sans pression, mais avec ambition ! Après ce sera le monde professionnel, sans aucun doute.

BN: 4 années, c’est rapide et long à la fois, tu n’auras pas la tentation d’aller chez les pros avant cette échéance ?
Je suis assez jeune, et 4 années c’est le temps qu’il me faut pour me perfectionner à l’international. Beaucoup me disaient même d’attendre 2028 pour Los Angeles, mais la c’est vraiment trop long, puis moi à la base je suis un grand passionné de la boxe professionnelle. Je suis d’avantage la boxe pro qu’amateur hormis lorsque les Français combattent ou lors des JO. Mais la boxe pro j’en suis vraiment fan, j’adore le show, le spectacle, le côté un peu business du sport, je kiffe. Mais une chose est clair, que je participe aux JO ou pas, après 2024 je serai boxeur professionnel.


BN: Tu arrives à visualiser la carrière pro que tu souhaites avoir ? jusqu’où voudrais tu aller ? 
Beaucoup de boxeurs après les JO passent pro juste pour le plaisir, juste pour y goûter. Moi si je passe pro, c’est avec de vrais objectifs, un plan de carrière, en étant bien entouré. Quand je regarde les Cissocko, Yoka, etc… eux ils se donnent 4, 5 ans pour obtenir une chance mondiale, moi ce sera la même chose. Mon but : décrocher les titres, la ceinture WBC la plus belle à mes yeux, unifier les ceintures, c’est le rêve  absolu, pour moi c’est même plus haut que les Jeux Olympiques.En plus si je passe pro après 2024 j’aurais 22 ans, donc je serais assez jeune et je commencerais à peu près au même âge que Christian M’billi, aujourd’hui quand on regarde Christian, à 25 ans et il est déjà dans les top 15 WBC!

BN: Qui t’inspire et te fais rêver dans le monde du Noble Art ?
Bien évidemment ceux qui me font rêver ce sont les Mayweather, Canelo, Joshua, Ali… Mais mon exemple phare dans le noble Art Français, c’est Souleymane Cissocko, c’est véritablement le modèle à suivre. J’essaie de me voir en lui, d’abord par ce qu’il est issu de la banlieue parisienne, comme moi, et en général ce n’est pas évident d’en sortir quand on vient de ces quartiers. Mais lui a réussi et  je veux faire pareil, je veux me dire que même si je viens de la banlieue, je n’ai pas mal fini, je n’ai pas fini en prion, je m’en suis sorti ! Une autre de mes inspirations en France se nomme Bilel Jkitou, j’adore ce qu’il apporte à la boxe, c’est un véritable Showman, il fait de véritables entrées, il est dans le côté spectacle et il joue vraiment le jeu, sa vision de la boxe me plait vraiment donc j’essaie de faire un mixte entre ces deux boxeurs.

BN: Quel est ton style sur le ring ?
J’ai une boxe un peu bizarre sur le ring (rire), en générale on me dit « Chadi tu fais 1m90! Boxe à distance, ne prend pas de risques ! » mais même quand j’essaie de boxer à distance, ça ne me correspond pas, je trouve ça un peu ennuyant, j’aime le contact donc en général peu importe la taille c’est moi qui vais chercher l’adversaire! D’après ce que disent mes entraîneurs et adversaires, une de mes qualités c’est mon punch, j’ai une frappe assez puissante et du coup aujourd’hui je travaille d’avantage ma vitesse car si je peux allier force et vitesse c’est le top.

BN: Quels sont tes sentiments avant de monter sur le ring ? Tu as peur ?
Tout est une question de confiance chez moi, quand j’était plus jeune j’avais tendance à me mettre la pression, juste avant de combattre je me posais tout un tas de questions et ça créait des inquiétudes, je repensais au jour ou je ne m’était pas assez entraîné, je regrettais de ne pas avoir fait d’avantage tel exercice, etc… Aujourd’hui ce n’est plus le cas. C’est Mohamed Taleb l’entraîneur de l’équipe de France Junior qui m’a dit un jour : « Chadi, si tu arrives à prendre confiance en toi tu peux faire des dégâts ! » donc pour arriver à gagner cette assurance c’est simplement un travail psychologique que j’exerce avant les combats. Je me dis que mon adversaire n’est jamais aussi prêt que moi, que je suis le meilleur, que je vais gagner. Et puis si l’adversaire me bat, c’est qu’il aura été meilleur que moi ce jour la, et si on reboxe je le battrais la prochaine fois. En général, arrivé sur le ring, une fois que le premier coup est parti, le stress s’évapore, je suis dans mon combat ! Et ce qui me donne beaucoup de force lors de mes combats c’est le public, à chacun de mes déplacements j’essaie d’emmener le maximum de monde avec moi, la famille, les amis, le club, j’en ai vraiment besoin. D’ailleurs c’est un de mes très bon souvenirs en équipe de France, tout le monde se soutient lors des combats, j’avais la chance d’avoir une très bonne équipe et quand je combattais je n’étais pas seul, on était 12 sur le ring, avec les encouragements, la joie lors des victoires, la tristesse de chacun lors des défaites, un véritable esprit de famille !


BN: Comment s’est passé ton confinement ?
Ça a beaucoup changé nos habitudes, la salle était fermée et on nous autorisait 1h d’entrainement par jour, c’était un confinement assez strict dans ma ville donc pas le choix. On se basait sur les footings, du renforcement musculaire en extérieur, pas plus. Malheureusement je devais participer aux championnats d’Europe en Mai qui était qualificatifs pour les mondiaux en fin d’année et tout à été annulé. Mais je ne pense pas avoir perdu de temps car en vérité j’étais à deux doigts de déclarer forfait pour une rupture du ligament du pouce et quelques jours après on m’annonce que tout est annulé. Donc c’était un mal pour un bien, puis si moi je ne fait pas les championnats… personnes ne les fait non plus, c’est comme ça (rire).

BN: J’ai adressé une question à Bigot Marseille te concernant, quelles sont tes impressions sur votre rivalité ? 
Bigot est un boxeur que je respecte énormément, et avant d’être un adversaire c’est un ami ! On s’est rencontré à deux reprises, il m’a battu en finale des championnats d’Ile de France, je ne me suis pas démotivé, je me suis entraîné très dur en sachant que j’allais le rencontrer de nouveau à l’avenir,  je l’ai battu en demi finale des championnats de France.  J’en suis très fier car ma conception de la boxe c’est que si tu veux être le meilleur tu dois combattre les meilleurs, et lorsque je suis monté en 64 kg, Bigot était le meilleur, c’était sa catégorie. C’est un des boxeurs dont j’ai pris le plus de plaisir à boxer car il y avait beaucoup d’engouement autour de ce combat, et c’est toujours un plaisir de mettre les gants avec lui !

BN: Et pour finir quand reverra t on « The little Pharaon « sur le ring ? 
J’espère fin 2020, on parle de septembre ou d’octobre, je change de catégorie pour allez chez les 69kg, je vais faire un ou deux combats sans casque avant de reprendre les championnats pour prendre un peu de galon. Je voudrais dire merci à tous ceux qui me soutiennent, de près ou de loin, sur les réseaux sociaux, ma famille, tous mes amis, les gens du quartier où j’ai grandi et qui on suivi tout mon parcours.  Je sais que beaucoup me critiquent dans la boxe mais c’est comme ça, je me dis qu’à chaque bienfait un envieux, donc c’est bon signe je suis sur la bonne voie. Et comme m’a toujours dit mon père, la personne qui n’est pas capable d’accomplir ce que tu fais te jalousera, donc on peut dire qu’il y en a pas mal qui ne peuvent pas faire ce que je fais !

Photos Vincent FENECH

Laisser un commentaire